Après les événements relatés dans Infinity War, les héros survivants planifient une riposte contre Thanos pour sauver ce qui peut encore l’être…

Disons-le d’emblée, Avengers : Endgame n’est point un chef-d’œuvre. Et il faut l’avouer, le d’entrée, c’est bel et bien un produit. Pourtant, il est vrai qu’auparavant, se distinguaient uniquement des films d’auteur et des monuments au sein de la culture populaire. Il est certain qu’une large partie des Star Wars (bien avant Disney), les longs-métrages de James Cameron, ceux de Peter Jackson sans compter bon nombre de travaux de Spielberg sans oublier ceux de Rodriguez ne sont point des friandises artificielles…

En fait si, même si cette assertion brise les illusions cinématographiques de certains, mais la culture populaire a accouché davantage de produits que de chefs-d’œuvre (il y en a eu Blade Runner, Ghost In the Shell, Brazil par exemple), mais il faut être intellectuellement de mauvaise foi pour crier au génie digne des Ford, Murnau, Hawks, Kurosawa ou Renoir lorsque l’on voit Avatar, King Kong, Alita et consorts. Ce sont aussi des concepts formatés, mais le quotidien de nos contemporains a écourté leur mémoire et embelli comme à l’accoutumée les souvenirs.

Formule gagnante ?

Ce qui fascine et qui agace tout autant au sein de la franchise Marvel Cinematic Universe c’est bel et bien leur construction en forme de série télévisée qui a entraîné une somme conséquente de long-métrage ces dernières années, avec le triomphe au box-office que l’on connaît, mais également de pures réussites formelles pas à la hauteur d’un Blade Runner, c’est indéniable, mais au moins des King Kong et Avatar. La force de cet univers tient à la fois dans une exposition au cas par cas et une démarche accrocheuse permanente qui se réfère aux autres films comme les épisodes d’une authentique série télévisée.

Ce nombrilisme déconcerte, énerve, mais se pare d’une certaine nouveauté dans l’Histoire du cinéma. Si un art veut que ses praticiens fassent évoluer leur époque, il est donc difficile de remettre en question cet aspect apporté par les studios Disney depuis le début de ce projet. Certains se gausseront de ce qu’ils jugeront comme une recette marketing supplémentaire, d’autres reconnaîtront un coup de maître, toutes proportions gardées. Pour l’heure l’entreprise de la marque a bouleversé quelque part l’une des grandes définitions du septième art. Pour le théoricien et critique Serge Daney, un film c’est l’invention du temps, comment s’en attribuer pour développer sa narration avant le mot fin. Le Marvel Cinematic Uinverse a si ce n’est redessiné au moins repoussé certes facticement les limites de ce concept essentiel.

Pour le pire et pour le meilleur

Avengers : Endgame souffre sans doute d’une écriture inégale et le script s’avère tantôt élégant, tantôt maladroit. Il pêche aussi par un rythme décousu, même si les metteurs en scène s’attardent néanmoins à exposer la situation des uns et les autres. Beaucoup lui reprocheront son manque d’esbroufe. Pourtant, en faisant monter la tension crescendo et en refusant les artifices usuels dans les deux tiers du long-métrage, les frères Russo prennent le risque de se servir des formules pratiquées sur Rio Bravo ou Les Sept Samouraïs toute proportion gardée.

Mais surtout, puisqu’il s’agit ici de clore une saga conçue comme une série télévisée (vingt-deux films tels vingt-deux épisodes d’une saison classique sur petit écran), les deux réalisateurs bouclent un parcours avec efficacité et un retour aux sources difficile à imaginer ces dernières années. Si le héros américain s’est mû en super héros depuis Richard Donner et si Joseph Campbell trace les destinées de moult protagonistes depuis plus de soixante ans, par conséquent le Marvel Cinematic Universe par la conclusion de son Avengers : Endgame scelle le formatage définitif de tout un pan du cinéma qui a commencé bien avant lui, mais modernise aussi cette méthode héritée de l’auteur du Héros aux mille et un visages. Tout revient à une question d’origines comme le soulignait Samuel L. Jackson dans Glass, mais également à savoir qui l’on est, sempiternelle interrogation de tout personnage de fiction.

Si la redondance doit être de mise, alors Avengers : Endgame est bel et bien un produit. Jetable pour certains, juste consommable pour d’autres et pour le reste délectable. Force est de constater à l’arrivée qu’en dépit de ses défauts, de ses ratés, de cette aura mercantile que tous lui reprochent, le long-métrage des frères Russo a le mérite de construire sa narration avec un classicisme éprouvé digne de certaines épopées d’antan. Réjouissant c’est bel et bien le mot qui convient à cette conclusion.

Film américain de Joe et Anthony Russo avec Robert Downey Jr, Chris Evans, Mark Rufallo, Chris Hemsworth. Durée 3h01. Sortie le 24 avril 2019

François Verstraete

 

Share this content: