Li Fong, un adolescent qui s’entraine au sein du dojo de Mr. Han en Chine, déménage avec sa mère pour New York. Sur place, il se lie avec Mia et son père, une relation que voit d’un très mauvais œil Conor, l’ancien petit ami de la jeune fille et champion de karaté local. Les deux garçons ne vont pas tarder à s’affronter dans un prestigieux tournoi d’arts martiaux, où tous les coups sont permis…
Parmi les franchises juteuses hollywoodiennes, nées durant les années quatre-vingt et largement surestimées, on retrouve Karate Kid, qui s’appuya sur une formule efficace à défaut d’être révolutionnaire ou intelligente. En entrelaçant les codes du cinéma d’arts martiaux venus d’Extrême-Orient avec l’initiation d’un adolescent en proie au harcèlement scolaire, le long-métrage de John G. Avildsen s’était offert un succès inespéré, bien aidé par le charisme du comédien Pat Morita.

Bien entendu, les sirènes du box-office incitèrent la production à accoucher de deux autres volets, de moindre qualité. Et en 2010, un remake relança la licence avec Jackie Chan en tête d’affiche, avec un autre triomphe en salles à la clé. Pour cette raison, tout comme le dojo adverse du premier opus, la saga ne peut pas mourir et la série Cobra Kai, voguant sur la fibre nostalgique qui pollue l’industrie actuellement, lui a injecté une nouvelle jeunesse.
Fort de ce regain de popularité, les studios en ont profité pour développer un énième film, censé réunir les senseis Jackie Chan (enfin plutôt sifu, incongruité de l’épisode de 2010, intituler encore le long-métrage Karate Kid, quand le protagoniste pratique le kung-fu) et Ralph Macchio. Une façon comme une autre pour les scénaristes de répondre aux concepts à la mode, à savoir construire un univers étendu même s’il faut employer des artifices grossiers… comme quoi les super-héros ne sont pas les seuls à user des procédés racoleurs. Et Karate Kid : Legends naît de cette gestation douloureuse, perclus de défauts et difficilement regardable !

Initiation ratée
Les premières minutes le confirment, par un rapide résumé contant la rencontre entre le clan Miyagi et Han, permettant d’accorder les grosses ficelles d’un scénario quasi inexistant. On devine d’ailleurs assez vite que l’aspect initiatique cher à la franchise sera éludé ici, ce qui pourrait constituer une approche intéressante si Jonathan Entwistle proposait quelques idées susceptibles de combler le récit. Autrefois, l’apprentissage renvoyait aux belles heures de La 36ème Chambre de Shaolin, fascinait par la démonstration des exercices et la capacité des cinéastes à retranscrire la ténacité des élèves.
Dans Karate Kid : Legends, Li Fong n’aura le droit qu’à une leçon accélérée, pressé par le délai infime qui sépare sa préparation à son tournoi. Une manière comme une autre d’écourter les échanges entre Jackie Chan et Ralph Maccio, cette relation se soumettant par conséquent à un fan service des plus dérangeants (à l’image de la rixe pendant laquelle ils sont opposés à quelques spectateurs d’un combat sans saveur). Or, l’absence de profondeur d’écriture des personnages et des liens les unissant résulte d’une durée trop limitée (une heure trente-quatre) pour un long-métrage désirant s’engager sur de nombreuses pistes.

On déplore d’ailleurs que le réalisateur les explore au moyen de méthodes surannées, sans jamais extraire le maigre potentiel de son dispositif. Ainsi, les rapports père-fils-frère entre Ben Wang et Joshua Jackson ne reposent que sur une inversion des rôles et le poids de la culpabilité, relatés avec une illustration crasse. Quant au principe de déracinement tant attendu, il est réduit à sa plus simple expression par l’intermédiaire d’une balade en scooter dans les rues de New York.
Lassitude
Voilà pourquoi Karate Kid : Legends lasse très vite le spectateur, ce en dépit de sa courte durée. Si certaines thématiques abordées sont plus que jamais d’actualité, à l’image de l’emprise toxique de Conor sur Mia, elles ne sont jamais traitées avec le minimum de soin ou d’élégance pour se distinguer. Et la galerie de protagonistes n’est pas épargnée par cette tendance, puisque beaucoup d’entre eux sont à peine esquissés et servent de figurants insignifiants tel Alan ou encore le personnage de Ming Na-wen. On est balloté entre différents enjeux, souvent sans importance ou valorisés artificiellement.

Ainsi, le combat de boxe organisé n’existe que pour justifier les démons du passé tandis que le réalisateur se contente de dupliquer un modèle, sans jamais instiller une quelconque saveur, y compris à l’occasion des joutes à mains nues. Mixer les styles afin de marier kung-fu et karaté s’avérait intéressant sur le papier à défaut d’être innovant. Toutefois, hormis quelques acrobaties, Jonathan Enwistle ne réinvente en rien les chorégraphies made in Hong-kong. On se remémore alors de l’entreprise de Gordon Chan, qui conjuguait brillamment arts martiaux japonais et chinois dans son Fist of legend : La nouvelle fureur de vaincre. Ce souvenir souligne davantage l’échec de Jonathan Entwistle et de son équipe.
Le public, lui, oubliera très vite cette accumulation de stéréotypes et envisagera éventuellement de délaisser cette franchise inapte à se régénérer. Comme quoi, puiser dans les années quatre-vingt ne sauvera en aucun cas Hollywood… et le reste de la production cinématographique d’ailleurs.
Film américain de Jonathan Entwistle avec Jackie Chan, Ben Wang, Joshua Jackson, Ming Na-wen. Durée 1h34. Sortie le 13 août 2025.
L’avis de Mathis Bailleul : En bon (pas bon) legacyquel qui se respecte, Karate Kid : Legends, suite des films et de la série Cobra Kaï, vous ordonne de dire adieu à toute recherche de nouveauté car c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures. Bilan : victoire par K.O. Karrément. Oubliable.
François Verstraete
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