Sous la France napoléonienne, François Vidocq, ancien bagnard en fuite, collabore avec la police de Fouché pour racheter sa liberté.

Metteur en scène peu prolifique s’il en est, Jean-François Richet a toujours affiché un véritable amour du cinéma de genre. Si son œuvre s’avère hétérogène aussi bien en thématiques qu’en qualité allant du très honorable Mesrine au très pâle Un moment d’égarement.

Il revient ici nanti d’un budget considérable pour adapter librement les aventures de Vidocq, personnage historique pour qui l’imagerie populaire aura pris le dessus sur la réalité. Il retrouve son acteur fétiche Vincent Cassel, habitué à ces rôles de gueule cassée, mauvais garçon au cœur tendre. D’ailleurs, le cinéaste est également un adepte des laissés pour compte et des rebelles depuis son long métrage aujourd’hui oublié, Ma 6T va craquer.

Débauche d’effets

Pour ce nouveau portage des tribulations de Vidocq après moult épisodes télévisés et un essai de Pitof à enterrer, Richet emploie les grands moyens, reconstituant avec richesse la France napoléonienne. S’il ne se soumet pas à la chronologie du protagoniste, il en restitue pour autant la saveur émanant de son caractère antihéroïque, justicier avant l’heure en guerre à la fois contre un système corrompu et des voyous dont il dit se détourner. Bandits et policiers dans cet enfer, tout est à jeter. Sauf ses compagnons d’infortune : un ancien taulard ivrogne, une prostituée, un noble et son fils déchus. Un groupe hétéroclite s’il en est qui va se mettre en quête d’une nouvelle vie, d’une nouvelle chance.

Pour donner du rythme à son dispositif narratif et appuyer là où cela fait mal, Richet démultiplie les références à l’image de la scène d’ouverture sordide et cruelle où l’on voit un forçat exécuter un rat à coups de bâton. Le spectateur avisé se souvient à cet instant précis de la même férocité employée par Peckinpah dans La Horde sauvage et par Sergio Leone dans Il était une fois la révolution.

Pour un résultat mitigé

Par la suite il impose dans ce décor mêlant déliquescence et faste une ambiance toute melvillienne ; nul doute que le personnage de Vidocq n’aurait pas dépareillé avec ceux de l’auteur du Cercle rouge. Quant au duel final, il renvoie tout droit à un autre disciple du metteur en scène du Samouraï, tant l’affrontement viscéral dans l’église renvoie furieusement à John Woo. Pourtant, en dépit de toutes ces bonnes intentions, le long-métrage peine très souvent à s’extirper du simple produit tandis que le cinéaste affiche des ambitions élevées.

Malgré quelques dialogues fort bien troussés (à l’image de la rencontre entre Vidocq et Fouché) et quelques plans fort à propos, le film remplit plus un cahier des charges au lieu de s’émanciper réellement à l’instar du diptyque consacré à Mesrine. Ainsi l’usage judicieux du champ contrechamps lorsque Vidocq attend une menace de nuit qui ne vient pas contraste avec les scènes suivantes dénuées de toute finesse formelle. Difficile donc de s’accrocher à un quelconque wagon tant le tout souffre d’une schizophrénie permanente. Cependant, comme à l’accoutumée, Vincent Cassel excelle dans ce rôle de gueule cassée et sauve très souvent l’entreprise de Richet, des poncifs d’usage.

Film sur courant alternatif, L’Empereur de Paris laisse entrevoir tout de long de belles promesses qu’il ne concrétise que trop rarement. Incapable de se sortir de la torpeur propre à de nombreuses grosses productions, il rejoint les objets formatés certes sympathiques, mais désincarnés.

Film français de Jean-François Richet avec Vincent Cassel, Freya Mavor, Denis Ménochet. Durée 1h50. Sortie le 19 décembre 2018.

François Verstraete

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